Rémi Dumery, cultivateur : «Chaque jour, la confiance dans l’industrie agroalimentaire baisse»
Dans une tribune au Parisien-Aujourd’hui en France, Rémi Dumery, cultivateur, souligne que l’agriculture va redonner confiance aux consommateurs grâce au numérique https://t.co/PjbARCMY2r
Je remercie vivement Parisien-Aujourd’hui en France de la publication de cette tribune.
Je propose sur le Blog la version longue de l'article d'origine.
La confiance des Français en l’agriculture s’érode au rythme des scandales sanitaires à répétition. La semaine passée, une enquête de 60 millions de consommateurs nous apprenait que manger bio n’apportait aucune garantie ; le jour suivant éclatait un scandale alimentaire impliquant quatre grandes associations caritatives ont été livrées des cargaisons de faux steaks hachés. Entre les rapports à charge et les escroqueries alimentaires, l’agriculture a fort à faire pour redorer son image de marque et rassurer le consommateur.
Je propose sur le Blog la version longue de l'article d'origine.
Faux steak hachés, fausses promesses du bio… l’agriculture
innovante permettra-t-elle de renouer avec la confiance ?
Bio qui
ne tient pas ses promesses, faux steak hachés à base de gras et de soja vendus
aux associations : chaque jour qui passe, la confiance en l’industrie
agro-alimentaire et en l’agriculture est mise à rude épreuve. L’image de cette
dernière est tout particulièrement écornée. La réponse à cette crise est
endogène : elle appartient à l’agriculture elle-même. Une agriculture plus innovante, servie par des avancées
technologiques à même .
Une confiance mise à rude épreuve
La confiance des Français en l’agriculture s’érode au rythme des scandales sanitaires à répétition. La semaine passée, une enquête de 60 millions de consommateurs nous apprenait que manger bio n’apportait aucune garantie ; le jour suivant éclatait un scandale alimentaire impliquant quatre grandes associations caritatives ont été livrées des cargaisons de faux steaks hachés. Entre les rapports à charge et les escroqueries alimentaires, l’agriculture a fort à faire pour redorer son image de marque et rassurer le consommateur.
Pourtant, à en juger par le dernier sondage IFOP paru début 2019, « 74% des Français pensent que les consommateurs peuvent
avoir confiance dans les agriculteurs ». Si ce chiffre semble plutôt
encourageant, il doit être pris avec des pincettes, car seuls 53% les jugent
respectueux de l’environnement, ce qui montre à quel point l’opinion méjuge ces
professionnels pourtant, dans l’immense majorité, soucieux de préserver leur
environnement via des pratiques agricoles responsables.
Il faut
donc tout faire pour entretenir mais surtout consolider cette confiance. Pour
cela, une seule solution : communiquer encore et encore afin de vulgariser une
agriculture promise à davantage de complexification, afin de pouvoir atteindre
des objectifs toujours plus ambitieux : produire pour une population
croissante, tout en pratiquant toujours plus d’économie de moyens et en étant
animé d’un souci constant du respect de l’environnement.
Recréer du lien entre la campagne et l’urbain
Depuis
l’exode rural, le lien n’a cessé de se distendre entre les agriculteurs et les
urbains. Même si depuis quelques années le phénomène des « rurbains »
illustre un début de reconquête des esprits citadins par la campagne, il n’en
reste pas moins qu’une majorité de concitoyens est totalement coupée de ses
racines et n’a plus idée de ce qu’il se passe réellement dans les campagnes.
Comme
on l’a vu, les affaires qui sortent épisodiquement dans les médias ont un effet
dévastateur sur l’opinion. Et disons-le clairement, certaines personnes sont
terrorisées. Aussi, nous pensons fortement que le succès du bio, ou encore de
procédés tels que la biodynamie, s’explique par le fait que les consommateurs
veulent connaître « le type qui fait pousser ». Et tous ces labels
leur donnent l’impression de remplir cet impératif. Le milieu agricole n’en n’a
peut-être pas pleinement conscience, mais l’un des enjeux de la production de
demain passe forcément par cette capacité à informer et rassurer… en bref, il
est impératif de mieux communiquer. La bienveillance dans les agriculteurs, les
hommes et les femmes de la terre, est indispensable, mais elle est
indissociable de la confiance dans les produits de nos agricultures.
Une
simple campagne de marketing ne résoudra pas le problème : il faut expliquer le
fond, fournir de nouveaux éléments de compréhension à un public envisageant
bien souvent l’agriculture par le seul prisme de médias et associations en
quête de sensationnel. A ce jour, l’agriculture a connu trois grandes
révolutions. Il est impératif de mieux faire comprendre les innovations
qu’apporte la révolution numérique, dernière en date, et de voir en quoi elle
est à même de résoudre des problèmes qu’avait laissé en jachère la révolution
verte.
La blockchain : de la fourche à la fourchette
Si
l’agriculture d’après-guerre, en s’industrialisant, a réussi à nourrir l’humanité
sans que cette dernière ne pose de question, elle réclame désormais de savoir
comment elle s’y prend. Elle tient à savoir d’où proviennent les aliments qui
finissent dans son assiette. La troisième révolution agricole possède les
outils pour répondre à cette demande. Notamment via la blockchain, qui permet
de tracer un aliment sur l’ensemble de la chaîne alimentaire. Ce cahier
« public » dans lequel seront consignées toutes les informations sur
un produit (date, conditions et lieu de production) est totalement
infalsifiable et fournit une garantie inégalée. Le producteur, grâce à des
solutions technologiques, peut enregistrer les données pour l’ensemble de sa
récolte et fournir en temps réel ces informations. La connaissance du produit
est totale.
Soucieuse
de transparence, l’ONG World Wildlife Fund a ainsi mis au
point une solution, fondée sur la blockchain, permettant de s’assurer que les
poissons sont issus d’une activité de pêche responsable avec des entreprises
qui respectent les normes de travail des pêcheurs. Un autre avantage de ces
solutions de gestion des données, c’est qu’elles permettent d’informer en temps
réel les distributeurs, ce qui permet ainsi de garantir la fraicheur des
produits et d’éviter les pertes de marchandise dues au gaspillage. Autre
exemple : la star-up Ositrade propose une solution blockchain pour le
commerce de grains.
Ces
solutions intelligentes font partie des nombreuses ressources de l’agriculture
innovante et, comme on le voit, celle-ci est bien éloignée de l’agriculture de
nos grands-parents… ce modèle illusoire auquel certains se réfèrent, sans
réaliser qu’ils continuent de nous faire des promesses intenables. Mieux vaut communiquer
sur les innovations qui répondront aux exigences légitimes que réclament les
consommateurs aujourd’hui… c’est à ce prix qu’on regagnera leur confiance.